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CD chroniqués

  Lou Saintagne 

Lou Saintagne        "Toute de "garve" vêtue"
C’est la nommée Saintagne qui s’en va chantant ce qu’elle a à dire et à décrire sur “les progrès d’une garce”, titre de son spectacle, tiré d’une chanson de Mac Orlan qu’elle interprète. Chatte minaudante, femme conquérante ou fatale, libertine coquine, cette garce-là vitriole l’amour d’un humour grinçant et tendre à la fois. Taquineuse, moqueuse, gouailleuse, enjôleuse, ensorceleuse, mielleuse, Photo X                 malicieuse, voluptueuse, langoureuse, allumeuse, charmeuse, son aura est redoutable. Sous sa rousse crinière de lionne, Lou sort ses griffes et égratigne les hommes pris au piège en dévoilant elle même l’âme perfide au souffle court des ivresses, trompeuses au cœur de la passion. Lou Saintagne chante merveilleusement bien cette garce- là d’une voix où flirte l’accent pointu d’une Parigote ressuscitant les faubourgs du Paris d’autrefois, celui des chansons françaises des années folles et bien avant même, jusqu’à la dernière guerre tout en faisant une incursion en notre temps, avec notamment deux chansons qu’elle a créées : une signée Pierre Philippe, “La supplique de Tantale”, l’autre Jean Guidoni, “<>Mon hystérique chéri” pour les paroles, Mathieu Gonet pour les musiques. Lou Saintagne interprète aussi “Alice et Alfred” de Pierre Philippe, Alain Bashung et Thierry Matioszek ainsi que “Quand tu n’es pas là” de Brigitte Fontaine et Yvonne Schmitt, sans oublier un certain “Rythme Américain” de Loulou Gasté. Quant aux chansons d’entre les deux guerres, elles sont signées Albert Willemetz, Pierre Mac Orlan, Xanroff et autres plumes plus ou moins célèbres, ce sont des titres du répertoire de Mistinguett, Yvette Guilbert, Marie Dubas, Lily Fayol, Jeanne Aubert, Irène de Trébert, chansons aussi d’avant 1900, telles que l’incroyable “Ovariotomie” (1896) et “On dirait qu’c’est toi” (1898). A entendre tout cela, on se paye une franche tranche de bonne humeur, et Lou Saintagne nous sert talentueusement ce répertoire avec la grâce et la personnalité d’une grande interprète de chanson française.
Une Lou Saintagne qui a commencé en 1989 dans un spectacle musical d’Alain Germain, “Les savants et la Révolution”, elle participera ensuite à la création des “Pinces à linges chantent Francis Blanche”, en 1994, ce sera une tournée en France avec le trio vocal “Douce France” en chantant Brel, Brassens, Trenet, Barbara, puis ce seront les chansons de Frehel. En 1997, il y aura l’élaboration d’un spectacle entièrement composé des chansons inédites de Marie Dubas, elle sera également en première partie des spectacles de Guidoni. En 1998, elle donnera 3 concerts à Washington dans des centres culturels, chantant en Français Scotto, Guitry, Fragson, Gainsbourg …! Cette année-là, en compagnie de Grégory Mouloudji, dans “Duo de la Butte”, elle interprète également Nougaro, Piaf, Bruant, Gougaud, Lemarque au Ciné 13 à Paris.
“Les progrès d’une garce” sera créé en l’an 2000 au Sentier des Halles, accompagné d’un quatuor à cordes et d’un piano. Elle reprendra ce spectacle au Théâtre du Tourtour dans une formule piano-voix, accompagnée par le pianiste Loïc Lafontaine. Comédienne, Lou a aussi enregistré de nombreux contes et légendes et 10 nouvelles de Maupassant.
Lou Saintagne, toute de “garce” vêtue, c’est l’élégance faite femme d’un goût raffiné sur le choix des chansons. Avec délectation, d’un charme particulier, elle est irrésistible et ensorcelante dans le rôle d’une garce en définitive oh combien adorable ! N’est-c’pas, Messieurs …?

J.R. (Mars 2001)

   Cécile Sarafis

" L'amour de la chanson d'une enfant du Midi "
C’est dans les années soixante, alors qu’à Paris se profilait à l’horizon la révolte estudiantine, qu’à l’autre bout de la France est née à Marseille la petite Cécile Sarafis sous l’œil bienveillant de la bonne mère, celle de Notre Dame de la Garde bien entendu ! Sarafis, nom d’origine grecque comme Serapis (Dieux guerrier, de la fertilité et protecteur des marins, Dieu suprême “l’unique Zeus Serapis”).
La mère de Cécile qui n’avait rien à voir avec celle siégeant tout là-haut sur la colline surplombant le Vieux Port, chantait à la maison tout en faisant partie
 Photo P. Tersiquel  d’une chorale. Issue d’une famille musicienne, la petite Cécile vivait au milieu de ses deux frères guitaristes, aussi apprit-elle la guitare et le saxophone. Si elle ne se mit à la pratique de la chanson que plus tard, c’est tout simplement parce qu’elle la trouvait ringarde, et ne voulant rien approcher de ce qu’aimait sa mère. Eternel conflit entre mère et fille ! Pourtant plus tard, elle comprit que la chanson était ce qui lui convenait le mieux, et puis, comme sa mère-grand, elle avait de grandes oreilles (pardon Cécile, je voulais dire : de bonnes oreilles).
C’est en 1991 qu’étant montée à Paris la petite Cécile Sarafis prit des cours de chant chez Luce Ferral, laquelle la programme directement sur la scène du Limonaire, la “pôvre” s’en souvient comme un des plus beaux jours de sa vie malgré un trac énorme. Nous la verrons ensuite dans différents petits lieux-chanson de Paris, accompagnée par Jean-Christophe Tant : elle interprète Jeanne Moreau, Nougaro, Anne Sylvestre, puis elle laissera tomber un “métier” trop difficile pour elle.
Il faut qu’elle rencontre en 1993 un musicien, un peu fou et génial à la fois, du nom de Nicolas Charmel qui lui remontera le moral et la convaincra de remonter sur les planches à l’aide d’un quatuor à cordes qu’il a formé pour l’accompagner avec des chansons écrites par lui même. La petite Cécile, bien sûr, est devenue grande, comme on dit à Marseille, elle chante un peu partout et écrit à son tour. En 1996, c’est la création du nouveau spectacle au Théâtre Clavel en première partie du Duo Laporte-Charmel. C’est alors le groupe “Sans Tambour ni Trompette” qui se produit ensuite au Limonaire.
Mais une vie de famille vient interrompre une seconde fois la vieCécile Sarafis artistique de Cécile avec la naissance de Marthe. Nous sommes fin 98. On pense que Cécile Sarafis est perdue pour le tour de chant, pourtant, elle remet ça : première partie d’Agnès Bihl à l’Ailleurs, elle hante différents lieux et chante en Avignon. En l’an 2000 c’est la fin de “Sans Tambour ni Trompette”. Cécile chante alors sous son nom de Sarafis et essaie de remonter un quatuor.
Intérimaire de la chanson comme elle précise, Cécile Sarafis écrit des chansons qui dénoncent la faiblesse des hommes, enfin disons plutôt des                 Photo X
femmes, l’ambiguïté du caractère etc… La chanson qu’elle a écrite et qu’elle préfère, c’est “Vieillesse”, dit-elle.
Dans la vie, Cécile est d’une folle générosité, d’une exubérance toute méridionale et rue parfois dans les brancards si on la tarabuste quelque peu. Malheur à celui ou celle qui se dresse sur sa route, notre Marseillaise au grand cœur vous “escagasse un pastisson sur le portrait” mais je galèje ! .. A part ça c’est une personne adorable, toujours prête à rendre service, j’ajouterai que, pour l’avoir vue chanter, je peux vous dire que la Cécile a un talent scénique expressif et de fort bonnes chansons à son répertoire, et si elle brûle les planches du succès, c’est normal étant native de cette ville où l’on s’enflamme facilement. Une Cécile Sarafis que je verrais très bien sur scène reprendre le rôle de la Fanny de Pagnol avec son Marius qui navigue plutôt sur un océan de musique. Mais chut… n’en parlez pas à Cécile, elle serait foutue d’abandonner une nouvelle fois la chanson !

J.R. (Juin 2000)

   Jean-Luc Schwartz 

"La part de nous qui toujours vole"
Accompagné par Alexandre LEITAO à l’accordéon, cet auteur-compositeur, interprète de ses chansons, est par ailleurs un remarquable mélodiste, créant des airs qui vous charment et restent aisément en mémoire. J-Luc SCHWARTZ s’accompagne au piano, avec une voix bien particulière, bien à lui, qu’il maîtrise parfaitement, souvenir de sa participation aux Jeux de la Tribu, groupe de jazz vocal aujourd’hui dissout.
Jean-Luc SCHWARTZ, c’est, en premier lieu, une affaire de fraternité et d’humanité. L’humain, les gens, les autres, partageant ce gros bateau d’la Vie, ”au grand palais du métissage, des jeunes des vieux des grands des p’tits” (Sarah, va)… Il nous chante les hommes, entre ceux qui montrent la voie, “sûrs d’eux, droits dans leurs bottes”, et les autres, “qui rament autant qu’ils peuvent” ou “en fond de cale”… Même si “les soupçons, les ptits culs, les gros cons ont franchi la rivière / Qu’ils vont foncer sur nous, nous couper tête et cou, nous brûler les paupières… ” (Quand tu chantes), finalement, “la belle affaire de nos Vies c’est bien d’les partager d’les mettre dans les mêmes lits” (Un petit air de liberté), que ce soit en Palestine ou ailleurs, car ce sont “cadeaux que ces mélanges / Des terres de France et d’Algérie” (Sarah va).
Des chansons pleines d’humanité, donc, et empreintes aussi de ce respect constant de l’autre, de cette attention qui sait se taire et écouter (“Allez M’sieurs Dames / Laissons parler l’feu d’nos âmes…”, Un petit air de liberté), puis rassembler tout ça en une chanson “de rires et de chagrins mêlés” (La part de nous qui toujours vole) ; pour exemple, ce magnifique Marinier d’la rue Prévert : “Mon marinier pleure tant qu’tu crois tes larmes courent comme des filles des bois / Tes larmes font chauffer l’hiver, et j’voudrais qu’ma voix serve à ça… / Et j’voudrais qu’ma voix serve à ça, à t’serrer très fort dans mes bras / Oh Bon Dieu”…Outre ce profond respect de l’homme, il y a aussi cet engagement, jamais gratuit, forcé ou immédiat. Tout est suggéré, proposé, avec toujours l’idée de fustiger les “corbeaux du diable / Picorant les lambeaux du beau destin des hommes” (Berceuse pour ne pas s’endormir), les totalitarismes de tous acabits, de ceux qui dressent “les uns contre les autres à oublier d’savoir aimer son dissemblable, son très très loin, celui qui chante en d’autres mots la belle lumière du matin” (Berceuse…); fustiger aussi les oeillères, cette “connerie des gens du front / Qu’ont peur de tout qu’ont rien compris” (Sarah va), moquer celui qui “s’méfie s’méfie s’méfie s’méfie l’soir et l’matin”, et qui un jour, dans la glace, voit sa “tronche et s’méfie d’soi” (Mon Cousin Louis). Rire enfin, du cabotinage (“R’garde ma poupée hé comme j’suis beau hu hu huuuu !”, Vas-y Paulo), et de l’assurance de celui qui se débat avec “tell’ment plein de certitudes à la fois” (Mon Cousin Louis). “Et Merde à la folie qui passe / Qui tue qui déporte et cadenasse” chante-t-il dans son petit air de liberté. Car la belle affaire, la seule à faire, c’est bien de “Souffler du bonheur / Sur les gens qu’on aime bien”, et d’exhorter les hommes à rester éveillés, éveillés politiquement, éveillés aux autres, éveillés à la Vie. 
En commençant cet article, je savais que l’œuvre était belle, et je pressentais qu’il y avait aisément matière à faire découvrir l’univers de Jean-Luc SCHWARTZ, et à donner envie de le découvrir sur scène. Par contre, je n’avais absolument pas mesuré cette infinie cohérence trouvée ensuite en réécoutant et en dépouillant les textes de ses chansons. J’aurais envie d’en écrire des pages et des pages, encore, sur cette écriture, ces arrangements, cet accordéon magnifique ; sur des analogies, aussi, trouvées avec tel ou tel, UTGÉ-ROYO (non pas pour la forme, mais pour le fond de l’engagement), PESTEL pour le côté « orfèvre », ciselé, BRASSENS pour ce refus de la facilité… J’aimerais qu’”au grand bazar des ch’mins qui s’croisent” (Sarah va), tous les amateurs d’UTGÉ-ROYO, de PESTEL, de la Belle Chanson soient là, même sans connaître, pour découvrir ce répertoire, magistral, étonnant.

François Gaillard (Journal A Fleur de Mots - Mars-Avril 2003)

"Un marchand de rêves..."
Grand gaillard dégingandé, l’air perdu dans les étoiles, le cheveu en tignasse claire et touffue, un sourire timide accroché aux lèvres, Jean-Luc Schwartz est, déjà au départ, un personnage poétique. Lorsqu’il se plie pour s’asseoir à son piano, il entre immédiatement en connivence avec lui. Et un dialogue commence entre le poète et l’instrument. Les rythmes des phrases et ceux des notes se bousculent, s’entrechoquent, s’entendent et se rejoignent nous plongeant dans un univers léger, tendre, drôle parfois. L’originalité musicale est indéniable même si parfois certaines dissonances peuvent évoquer la parenté de Debussy ou de Fauré. Les textes sont souvent des petits tableaux où des personnages pleins de fantaisie évoluent sans drames, dans un pays où il faut chanter, danser car "la voix est libre !". On peut dire qu’il est un héritier de Jacques Prévert dans sa manière de bousculer le langage et les idées.
Ce grenoblois a travaillé pendant plus de dix ans la voix et l’improvisation. Il était l’un des fondateurs du groupe vocal “les Jeux de la Tribu” qui donna une centaine de concerts en France et également à l’étranger. Il est en solo depuis maintenant six ans et, parallèlement, il anime des ateliers sur le chant et l’improvisation des chansons à Tours depuis 3 ans
Au milieu des chanteurs à textes que nous aimons, Jean-Luc est certes atypique par ce qu’il nous amène d’optimisme. Avec lui "la terre est à qui sait la prendre...".

M.V. (Juin 1998)

   Service Public 

Service Public “Le groupe le plus underground de Paris”
Le métro est une des plus grandes salles de spectacle de Paris. On y côtoie accordéonistes aveugles, quatuor de violons classiques, musiciens des Andes, chanteuses lyriques, jazzmens ou rockers. 300 autorisations sont ainsi délivrées chaque année et trois mille procès-verbaux dressés pour tous ceux qui se hasardent à jouer la note clandestine. La RATP n’hésite pas, d’ailleurs, à faire descendre en sous-sol l’événement musical comme en 1977 avec
    Photo A.M. Panigada                   l’opération “métro molto allegro” qui fit résonner 20 stations pendant quatre jours aux sons de plus de 100 musiciens avec un final station Auber qui réunit 5000 spectateurs. Le métro a d’ailleurs toujours été un thème de prédilection de la chanson : de Piaf à Renaud, de Téléphone à Gainsbourg.
C’est tout cela qui préside à la naissance en 1985 de ce groupe fort justement appelé “Service Public” dont les protagonistes sont tous agents de la RATP. A commencer par Jean-Michel Grandjean, conducteur de métro sur la ligne Balard-Créteil qui “ne conçoit pas la vie sans le plaisir de chanter dans sa cabine” et Ghislaine Lugand, soprano et chef de station à Opéra qui s’illustra dès son plus jeune âge dans plusieurs opérettes à succès (La vie Parisienne, Les Cloches de Corneville). Avec l’apport de trois collègues musiciens, ils constituent leur groupe, s’employant tout d’abord à défendre les grands standards de la chanson : Brel, Brassens, Ferrat, Trenet, Gainsbourg, Lapointe, ainsi que Berger, Renaud, Dutronc mais aussi à faire découvrir des auteurs actuels moins médiatisés tels Leprest ou Jean Dubois et son «petit pays».
L’aventure prend en 2000 une autre dimension, lorsqu’à l’occasion du centenaire du métro, Service public sort son premier album, tout entier consacré à l’histoire de ce dernier et rendant hommage à son inventeur : Fulgence Bienvenüe. De la naissance du métro sur un air de french cancan à l’an 2000, ils parcourent toutes les époques, du ragtime au rock, de 36 à 68 et enchaînent les chansons comme les stations. Exceptés Bruno Brel (“Dans le métro”), Patrick James (“Egaux, égales”) et Gainsbourg pour l’incontournable “Le poinçonneur des Lilas”,                Photo A.M. Panigada
les textes originaux y sont signés de Pierre Haralambon et les musiques de Jean Musy. Avec cet album fort médiatisé, ils totaliseront plus de 70 passages à la télévision et auront l’occasion de se produire devant 45 000 personnes à Bercy pour le Noël de la RATP.
Depuis, on a pu voir et entendre ces artistes, maintenant accompagnés du guitariste de Graeme Allwright, dans de nombreux lieux aussi divers que le Café Chantant, le Magique ou le Limonaire… ainsi qu’à la Fête de l’Humanité. Ils continuent de mettre leur talent, leur enthousiasme au “service” d’une véritable chanson populaire, celle qui nourrit les rêves, les espoirs, accompagne le quotidien, se fait le porte-voix de nos révoltes et de nos luttes. Une chanson citoyenne, une chanson de service public !

F.P. (Mars 2003)

   Vania-Adrien Sens 

" LE TEMPS DE LA SERIZE "

M.V. (Décembre 1999)

   Barbara Seibold

"Rappelez-vous de Barbara Seibols"
Avant la monnaie commune, voilà de la chanson européenne. C’est un retour en Ile de France, après exactement deux ans d’absence, de cette chanteuse helvète de culture franco-allemande. Formée au théâtre de Zurich, elle joua deux ans en Allemagne du nord (à Wilhelmshaven) des pièces classiques et contemporaines, des revues musicales et des tours de chant. A Paris, elle apprend la danse et continue le chant en travaillant, c’est extrêmement rare, trois disciplines du chant: le lyrique, la chanson française et le jazz vocal. Elle a monté plusieurs spectacles de cabaret en puisant dans le répertoire théâtral et le cabaret franco-allemand des années 20. Elle marie ainsi l’expressionisme allemand et le réalisme français avec humour, sans perdre le sens du dramatique. Aux chansons de Berthold Brecht et Kurt Weill qu’elle chante en Allemand, elle ajoute celles de Brel et de Mireille, ainsi que de contemporains tels que patrice Thomère et Jean-Marie di Maria. Sa pianiste, Deborah Shannon, et elle, ont un point commun: Toutes deux viennent, ces derniers mois, de connaître les joies de la maternité, celle-ci avec un petit Louis, celle là avec une petite Léa. Dommage qu’il ne s’agisse plutôt d’une Ella: Louis et Ella, musicalement, ça aurait imposé le respect!

M.V. ( Juillet-Août 1997)

   Claude Semal

  "L’anartiste"
Homme de spectacle, chanteur, acteur, journaliste, parolier, fondateur/animateur du Théâtre Le Café, Claude SEMAL, clown et philosophe, poète et citoyen, de traits d’humour en dénonciations, démonte et pourfend depuis près de trente ans les symboles de la "belgitude". Sa verve et ses coups de gueule dépassent largement le cadre de la chanson. 
Né à Bruxelles en 1954, dans un milieu enseignant, syndical et progressiste, après avoir achevé six années d'adolescence à l'Athénée Royal d'Uccle, il travaille dix mois comme ouvrier dans un atelier de maroquinerie. A 18 ans, il habite à cent mètres de la Grand'Place, au-dessus du "Grenier-aux-chansons" où il chante tous les week-ends. Il fait du théâtre pour les enfants, donne une centaine de récitals à Bruxelles et en Wallonie. A 20 ans, il rencontre, l'équipe de l'hebdomadaire POUR, devient permanent du groupe et travaille comme cuisinier, journaliste, secrétaire de rédaction et monteur Offset. Il contribue à la création de l'organisation d'extrême gauche Pour Le Socialisme et arrête alors, provisoirement, de se produire, comme chanteur.
En 1977, il crée "Les Ateliers du Zoning",, groupe culturel pour qui il écrit "La ballade d'Hoboken ", chanson, qui dénonce la pollution par le plomb de la principale entreprise belge de métaux, qui lui vaut d’être attaqué en justice pour "diffamation". Il sera acquitté. En 1980 il rencontre Georges Van den Broeck et monte avec lui deux spectacles de café-théâtre chantant "La situation est excellente, mais pas désespérée " et "L’avenir n’est plus ce qu’il était ".
Enfin en 1982, il enregistre son premier disque 33T et décide d'organiser sa vie autour de la chanson. Il continue par ailleurs de signer d'ironiques chroniques dans la presse d'opinion, fait l'acteur (animateur radio au cinéma et même le curé à la télévision). Depuis de spectacles en spectacles, de disques en disques, d’ "Ode à ma douche " à "L’hymne à l’amour " , il ne cesse de réinventer le tour de chant et dynamite moules et frites, pour un autre regard sur la Belgique. 
Multiples facettes que celles de Claude Semal, artiste à la fois tendre, révolté, iconoclaste, drôle et gouailleur qui passe de l’autodérision ("Le succès d’estime ") à l’humour provocant, de la tendresse ("Chacun a repris ses lèvres ", "Ce vide contre ton corps ") à la révolte. Son dernier album s’ouvre d’ailleurs sur un coup de gueule ("Comme en Belgique ") avec ce constat amer - "Ici pour une émeute, quatre-vingts processions / les oies marchent au pas / le merle est seul à siffler sa chanson / Ici pour un combat, quatre-vingts soumissions " - et Claude Semal ne manque pas, au fil de chacun de ses disques et spectacles, d’évoquer quelques affaires belges, l’odieux crime raciste et policier dont fut victime "Sémira " ou la terrible affaire Dutroux évoquée avec ce bijou de délicatesse qu’est "Les petites filles "
Cette Belgique, Claude sait aussi la décrire de bien belle façon, avec cette ode à la blonde qui pétille dans les verres ("Bête bière "). Semal a le sens du portrait, du croquis, dosant ironie et respect pour cette "Madame pipi " trônant dans le sous-sol de son café, s’attachant à la vie d’une fille paumée toute seule dans Bruxelles ("En écoutant Jarret ") ou montrant par quelques détails quotidiens, quelques traits, quelques subtiles transformations ce que c’est que "Devenir vieux ". Sur un air de musette, il se laisse aussi aller à la nostalgie des bals et des quartiers ("Saint Gilles", "Au bal musette"), et puis il y a cette voix, tour à tour caressante, déchirante, porteuse de rires ou de sanglots. Mais le portrait de Claude Semal ne saurait être complet si on oubliait son humour loufoque, volontiers surréaliste ("Les chaussettes célibataires ") ou ces tranches de franche rigolade que sont "Allergique à l’alcool ", "Montignac et mon ténia ".
"Anartiste" inimitable, toujours aussi truculent, émouvant et incisif, chanteur citoyen tendre et acéré, Claude Semal est un de ces "artisans de leur propre parole", une "baleine d’eau douce", espèce en voie de disparition qui "pratique dans un pays qui n’existe pas, un métier qui existe de moins en moins…". Et pourtant, cette œuvre est de plus en plus indispensable et salutaire pour lutter contre la haine, la bêtise et la morosité ambiante.
A ne rater sous aucun prétexte, on vous aura prévenu !!!

F.P. ( Mai 2004)

   Nathalie Solence 

 Ils ont fait revenir  " LE TEMPS DE LA SERIZE "

Jacques Serizier, pour ses amis chanteurs et pour le public des petits lieux, c’était “la Serize”. Drôle et émouvant, naïf et farfelu, tendre et imaginatif, quel personnage attachant il était ! Ainsi qu’il le chantait: “Venu de nulle part, il y retournait parfois”. Le voyant partir trop tôt il y a quelques années, on a envie de le faire souvent revenir. Pour notre plaisir. Surtout lors de cette année qui n’en finit pas de boucler son siècle car, pour beaucoup d’amateurs éclairés, l’année 1999 a été l’année de la Serize. 
Et ce, grâce à sa compagne Nathalie Solence et à quelques amis parmi lesquels Jules Bourdeaux, Vania Adrien Sens et Claude Gaisne.
Cela a commencé en janvier. Pendant le mois entier, onze petits lieux de Paris ont un soir affiché à leur programme, en hommage à un artiste qui ne mérite pas qu’on l’oublie, ce fameux “Temps de la Serize”.
Reposant entièrement sur des œuvres tirées de ses chansons et de ses textes, un montage fignolé par les quatre artistes cités ci-dessus permettait d’entrer dans l’univers de Jacques. Un régal ! Avec en “cerise” sur le gâteau dans chaque lieu, un ou deux amis-chanteurs ou comédiens invités qui venaient y ajouter un ou deux textes ou une ou deux chansons du répertoire de J.S. bien entendu. Parmi eux Anne Sylvestre, Michèle Bernard, Allain Leprest, Marc Ogeret, Christian Paccoud, Francesca Solleville, Jean-Louis Blaire, Michel Bulher, Claude Confortés, Vincent Absil, Christian Dente, Claude Duneton, Eve Griliquez, Bernard Haillant, Victor Haïm, France Léa, Marc Havet, Yani Darim et… moi-même. Une super-soirée réunissait tout le monde au théâtre de la Passementerie pour un spectacle inoubliable qui fut redonné quelques mois plus tard au Glaz’ Art lors de la sortie d’un magnifique coffret de 99 chansons et textes en 4 CD et un livret représentant l’intégrale dont le mérite de l’édition revient au Loup du Faubourg. (Distribution Socadisc Europe).
C’est le montage de nos quatre amis auxquels j’ajouterai aussi ma voix, que j’ai tenu à présenter pour la dernière veillée chantessonnienne grange de la Colombière. Pour ceux qui ont déjà vu Nathalie Solence dans son tour de chant que ce soit dans ses propres chansons ou dans d’autres, nous sommes sûrs qu’ils auront envie de la revoir. Artiste anti-star, elle touche par son authenticité spontanée et sa douceur qui n’exclut pas les coups de gueule ! Autour d’elle, le comédien Jules Bourdeaux, longiligne et plein d’humour, qui chante également avec des intonations qui ne sont pas sans rappeler celles de l’auteur et le chanteur Vania Adrien Sens, un transfuge de la Mouffe de la belle époque, avec tout ce que cela comporte de gouaille parisienne. Il revient à l’excellent guitariste Claude Gaisne le soin d’accompagner tout le programme. Cette dernière soirée promet d’être un splendide bouquet final.

M.V. (Décembre 1999)

"Pudeur et insolence chez Nathalie Solence"
"Sous la réserve, l'audace et l'insolence. Derrière la modestie, l'ambition de bien faire. Par delà la pudeur, la malice et le lyrisme. Et toujours, par devant la réserve, la modestie et la pudeur, toujours, la sincérité. Qu'elle joue la comédie ou qu'elle chante, elle dégage une force et un charme qui accentuent le subtil de sa fragilité et la violence de sa révolte(...) ses chansons tiennent parole et ne manquent pas d'air!"
C'était son compagnon, aujourd'hui disparu, le talentueux poète, tendre et baroque, l'inimitable Jacques Serizier qui s'exprimait ainsi. On aurait pu croire qu'il la transfigurait avec les yeux de l'amour. On sait aujourd'hui qu'il avait vu juste et que sous les maladresses et la voix insuffisamment travaillée, il avait su détecter le vrai talent. Ce n'est pas une insulte, certains le croient pourtant, que de qualifier un artiste de bosseur. Pour moi, c'est une immense qualité. J'aime lorsque l'artiste doué se fait artisan. Je suis témoin de cette conscience "artisanale" chez Nathalie et je l'en félicite. Sa voix s'est assouplie, nuance joliment les phrases, exprime avec chaleur ou avec délicatesse les couleurs de ses chansons. Elle s'est également révélée dans l'écriture d'excellents textes et de bonnes musiques. Jusqu'où ne pourra-t-elle aller?

M.V. (Mars 1997)

   Renaud Solivères

Renaud Solivères   On connaissait, à Janvry, Renaud Soliveres en tant que comédien et participant régulier aux spectacles créés chaque année ici. Il a en effet marqué les spectateurs pour ses rôles dans "L'enfant des Sources" et "La Nuit des Origines" en 98 et 99.
Acteur, il est aussi réalisateur et metteur en scène et il exerce ces activités dans les deux compagnies que sont "Les Tréteaux Ivres" et "Les Insensés". aussi à l'aise dans Tchékhov que dans Woody Allen, il a démontré tout son talent et remporté en 1998 le prix
Photo Wilfrid Bechtold        d'interprétation masculine de Festéa 98 à Orsay pour le rôle de "Héro" dans "La répétition ou l'amour puni" de Jean Anouilh. Pourtant, qui sait qu'il est aussi un interprète de chansons? Ceux qui l'ont vu dans le spectacle "Ciné-Massacre" de Boris Vian ont pu constater qu'il savait allier justesse de l'interprétation et de la voix. 
En effet, bien qu'autodidacte, Renaud a acquis une expérience musicale par sa participation à plusieurs groupes aux influences diverses - rock, jazzy, folk - et de nombreuses prestations en café-concert, M.J.C., bistrots...
La part la plus méconnue de son travail artistique que nous souhaitons faire découvrir est celle qui concerne l'écriture et la composition de chansons.
Cette chanson qui lui est familière parce que "tout môme, j'entendais mon père chanter Bruant, Brassens, Ferré, Brel, Colette Magny, Monique Morelli ...". Celui-ci se produisait dans les bistrots et les cabarets et faisait la manche pendant les vacances.
Ainsi, Renaud a très tôt aimé le texte qui raconte, le texte qui poétise. "Ce texte-là, dit-il, ressemblait à mon monde intérieur avec ses couleurs et ses sonorités, j'ai alors compris qu'on pouvait faire quelque chose de ce monde intérieur..."
Nourri des grands de la chanson, féru de poésie, admirateur de Rimbaud, il a découvert Gainsbourg, Higelin, Bashung, Renaud et Beaucarne...
De ces diverses influences, il a tiré une écriture qui se veut "exploratrice du dedans" où se mêlent lyrisme, ironie, provocation, sensibilité et tendresse.
Gageons que Renaud saura nous faire partager, le 26 février, son monde intérieur et que ce diable-là montrera qu'il n'est pas, comme il le dit dans une de ses chansons, "emprunté". Un coup de pouce donc à un compagnon de route théâtral et musical. A découvrir.

F.P. (Février 2000)

   Francesca Solleville 
Francesca Solleville

Francesca Solleville est la plus généreuse des rebelles de la chanson française. Avec son beau regard lucide posé sur le quotidien qui l'entoure, elle sait émouvoir son public fidèle et attentif qui reconnaît en elle la voix d'une femme, d'une artiste sincère qui lutte depuis le début des années 60 pour défendre des idées humanistes et fraternelles. Après avoir appris le métier de chanteuse lyrique avec Marya Freund, c’est la rencontre de Philippe Gérard qui l’engage pour chanter Aragon et celle de Léo Ferré qui la conduiront à inaugurer un répertoire de cabaret. Elle se produira à l’ Ecluse, la Contrescarpe, au Port-du-Salut… Elle croisera le chemin d’ Anne Sylvestre, Catherine Sauvage, Pia Colombo et aussi Aragon, Seghers et Jean Ferrat. Depuis 1962, date de la sortie de son premier disque, elle s’est produite à Bobino et dans de nombreuses tournées à l’étranger ( tout récemment encore , elle a fait une tournée au Japon qui a fait l' objet d'un enregistrement public ). Elle a reçu le grand prix de l’ Académie Charles Cros en 1964. Une autre rencontre importante fut celle d’ Allain Leprest avec lequel elle créa le spectacle et l’album « Al dente ».
Pour son dernier album original « Grand frère, petit frère », de très talentueux auteurs de la chanson lui ont offert leur collaboration Gilbert Lafaille, Allain Leprest, Pierre Grosz, Gérard Pierron Jean Vasca, Pierre Louki, Michel Bühler, Jean-Max Brua ainsi que Jean Ferrat...). Une des plus grandes interprètes populaires de notre pays.

F.P. (Mai 2002)

   Christiane Stéfanski 

"Une grande interprÈte, sans aucun doute"

Voilà une artiste chaleureuse qui nous réchauffe le cœur. Peut-être cette Wallonne née à Liège doit-elle cette chaleur humaine, ce partage de soi à ses origines Polonaises, où bien est ce parce qu’elle a grandi à Liège, cette ville cosmopolite et libérale, dans ce café tenu par ses parents où se côtoyaient Polonais, Belges et Italiens.
Ayant déjà le goût du spectacle, elle fera de la danse folklorique dès son plus jeune âge. D’une timidité presque maladive, elle va se lancer par la suite dans la chanson en interprétant les mots des autres, qui lui permettront de mieux s’exprimer. Cataloguée chanteuse engagée au début de sa carrière, entière, entêtée toute en étant timide et maladroite, elle s’est alors fermé quelques portes. Heureusement, d’autres se sont ouvertes, plus modestes et chaleureuses (voir interview de Christiane Stéfanski que j’avais réalisé pour le numéro 25 de la revue " Je Chante" de septembre 1999).
Au départ, Christiane Stéfanski avait pris pour modèle Catherine Sauvage et Pauline Julien, ensuite, elle s’est bâti un répertoire en chantant Anne Sylvestre, Michèle Bernard, Jean-Roger Caussimon, Bruno Brel, Claude Semal, Henri Goldman, Pierre Perret, Christian Legrève, Léo Ferré, Michel Gilbert, Gaby Verlor, Boris Vian… Cette interprète qui possède de grandes qualités humaines et artistiques vous avouera que les auteurs de chanson lui permettent d’exprimer ce qu’elle ressent, et que c’est exactement ce qu’elle aurait aimé écrire elle même. Les chansons, ainsi, s’imposent à elle.
Christiane Stéfanski possède plusieurs albums comme interprète, dont le dernier en date " Sawoura" , un mot qui veut dire "saveur " en Wallon. D’ailleurs, elle interprète également deux à trois chansons en langue wallonne. Elle se produit en compagnie de trois très bons jazzmen, avec des musiques particulièrement jazzantes réalisant ainsi un rêve de toujours. On peut dire que lorsqu’elle interprète la plupart de ses chansons, Christiane Stéfanski possède un sacré swing ! La chanson chez elle, en Belgique, est un artisanat. Il est difficile d’en vivre, aussi a t-elle par ailleurs un travail avec, dit-elle, une souplesse d’horaire lui permettant de se rendre disponible pour les besoins des concerts.
Mais parce qu’elle fait partie de "ces gens qui doutent, qui trop souvent écoutent leur cœur se balancer" , comme dit cette chanson d’ Anne Sylvestre qu’elle a mise à son répertoire et qui lui va si bien, et parce qu’elle trouvait qu’elle tournait en rond, elle a préféré, en 1986, prendre ses distances avec la chanson, mais pas avec la scène, puisqu’elle a créé alors un groupe de blues et monté un spectacle de poésie. Pourtant, en 1992, elle s’est sentie prête à remonter son propre tour de chant. Christiane, qui aime vivre dans ce "pays petit" avec sa "petite chanson" , peut aussi faire sienne les paroles de l’auteur Michel Gilbert "les chansons ne sont dans les flots des mots que ceux que j’ose répéter, si vous saviez combien j’hésite, combien j’ai peur de m’avancer, déjà rien qu’arriver jusqu’ici devant vous, déjà rien que tenir debout… j’ai peur et j’ai raison d’avoir peur de l’erreur, mais en même temps, j’ai tant à chanter dans le cœur". Oui, cette chanson-là lui colle aussi à la peau, et même si on aime "les gens qui doutent" , Christiane Stéfanski n’a aucune raison de douter d’elle même. Elle est tellement artistiquement talentueuse et humainement formidable que le doute n’est plus permis et je vous conseille vivement d’aller la voir sur scène, par exemple à Janvry où l’association Chant’Essonne organise chaque mois ces spectacles chanson d’une exceptionnelle qualité, ne doutant de rien, ne reculant aucunement devant la difficulté et l’adversité, récompensés qu’ils sont lorsque le succès de leur programmation est assurée.

J.R (Janvier 2005)

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